Archive for the ‘Trucmuches’ Category

Macskafogo (Béla Ternovszky, 1986)
30/12/2010

Macskafogo
Super souris et l’arme secrète (Mon dieu… j’y suis pour rien, c’est le titre officiel en français)
Réalisation de Béla Ternovszky
Film hongrois de 1986

La Hongrie a réalisé ses trois classiques du long-métrage d’animation dans les années 80. Vuk, un pseudo-Bambi mettant en vedette un renard est le film populaire classique. Feherlofia est le chef-d’oeuvre d’avant-garde expérimental. Et Macskafogo? C’est le film culte. Un beau trio de film qui ne se ressemblent pas du tout.

Macskafogo (qui veut dire attrape-souris, ou quelque chose comme ça) est une parodie des films à la James Bond, avec ses voyages aux quatre coins du monde, ses gadgets et son action. Les chats mènent une super organisation criminelle visant à exterminer les souris et ces derniers mènent leur opération underground. Les souris ont un super plan anti-chats qu’ils doivent aller récupérer au Japon mais les chats tenteront tout pour leur en empêcher. Le tout est agrémenté de comédie, dont énormément de jeux de mots hongrois et de références à la vie hongroise des années 80 mais il y a tout de même une bonne part d’humour universel. Le plus notable étant les quatres gangsters qui tentent de capturer le protagoniste du film. Ces personnages ont tous une personnalité propre, une belle réussite, qui donnent lieu à de bon gags. J’aimerais bien un dérivé mettant en vedette ces quatres personnages tiens. Autant dire qu’ils volent la vedette.

Il y a certains moments qui traînent en longueur et le film globalement a un rythme plutôt lent. Il y a un moment dans le film où deux actions sont misent en montage parallèle (c’est-à-dire que l’on voit les actions d’un personnage A, puis B, puis A…) qui donne l’impression de ralentir la progression de ces deux évènements. Le film s’en sort tout de même comme un bon divertissement et je ne pense pas m’être ennuyé. L’animation est plutôt pauvre sans être horrible, elle va au but sans rien accomplir de plus. À vrai dire, si le film n’avait pas énormément de moyens il s’en tire bien. Le style visuel est aussi moyen quoique travaillé (notamment pour le design de certains personnages). Le film a donc ses faiblesses, l’on aurait pu avoir quelque chose de mieux, mais comme il est, eh bien c’est pas mal du tout.

Valhalla (Jeffrey James Varab et Peter Madsen, 1986)
29/12/2010

Valhalla
Réalisation de Jeffrey James Varab et Peter Madsen
Film danois  de 1986

Valhalla, le paradis des viking situé au royaume des dieux, Asgard. C’est où réside Thor, le dieu du tonnerre. Celui-ci rend visite à des humains, et suite à une bêtise d’un jeune garçon, il amène ce dernier et sa soeur faire des corvées chez lui. Les deux jeunes se perdent dans Asgard par la suite.

La production du film a duré de nombreuses années,  nécessitant l’assistance d’un animateur de chez Disney, Jeffrey Varab, et a dépassé son budget de plusieurs fois au point de devenir le film danois le plus coûteux de l’histoire. Mais il s’agit certainement d’un film ambitieux. L’animation est d’une très bonne qualité. Ce n’est pas du niveau d’un vieux cartoon américain mais presque rien l’est. Dans les circonstances géographique et d’époque c’est un travail exceptionnel. L’esthétique et l’ambiance du film le dissocie de ses inspirations et le film ressemble davantage à un Disney à la The Black Cauldron/Taram et le chaudron magique (sorti quelques mois plus tôt) qu’un Disney gentil ou chantant.

Ce qui ressort de Valhalla c’est … uh… que c’est bien fait, l’histoire casse pas des briques et sert quasiment juste d’une excuse pour faire un dessin animé où il se passe des choses. Y a des gentils, des méchants, des personnages qui servent à rien (bonjour Odin), un début une fin. Un peu tout est une excuse pour avoir un dessin animé techniquement poussé mais du coup il n’en ressort pas quoi que ce soit de mémorable. Ce n’est pas engageant et ça ne se démarque pas vraiment. Oh, ça se laisse regarder. Mais est-ce cela que vous voulez d’un film? Quelque chose de regardable? C’est dommage qu’un film si ambitieux, avec un sujet cool comme la mythologie nordique soit finalement si commun. J’aime mon cinéma d’animation danois quand c’est Bennys Badekar ou les court-métrages de Børge Ring, sans complexer devant les américains.

The Point! (Fred Wolf, 1971)
28/12/2010

The Point!
Réalisation de Fred Wolf
Film américain  de 1971

Il s’agit d’un film fait pour la télévision, venant d’une époque lointaine où le hippie commun était vu comme le meilleur écrivain de contes pour enfants.  À mi-chemin entre Yellow Submarine et Puff the Magic Dragon (lui aussi réalisé par Fred Wolf), l’auteur du scénario et des musiques du film, Harry Nilsson (Everybody’s Talkin’, Without You) a même avoué que l’idée lui était venu pendant un trip d’acide. Vous voyez les enfants? Prenez de l’acide et vous allez voir de belles histoires comme ça!

Il n’empêche que le conte à morale n’est pas mauvais, par contre il est difficile à traduire en français. Dans une petit village où tout est pointu (has a point) un garçon voit le jour mais il a la tête ronde (has no point!), il est ainsi donc banni dans la pointless forest (la forêt sans pointes, la forêt sans but… vous comprenez un peu?) où il entreprend une sorte de voyage où il découvre ce qu’est un point. Je ne suis pas particulièrement fan des histoires à morale mais c’est intéressant et s’adresse à plusieurs aspects de la vie. Par contre c’est pas très bien fait.

On aurait pu couper l’image et passer le film à la radio, cela aurait parfaitement marché. Il y a toujours des personnages qui parlent au point qu’ils décrivent ce qui se passe à l’écran (Un personnage apparaît = look, there’s the pointed man!), de la narration gracieuseté de Ringo Starr et des chansons d’Harry Nilsson bouchent les trous. En plus que l’animation est très, très ordinaire, sinon carrément mauvaise et recycle souvent des scènes. L’esthétique visuelle se veut plutôt psychédélique et si il y a des moments inspirés ça aurait pu être bien mieux, on sent davantage une certaine pauvreté ici et là sans compter que certains dessins sont tout simplement pas beau. Juste une palette de couleurs différente aurait pu aider. Ça a tout les défauts de cette époque médiévale de l’animation et de ce que Chuck Jones qualifiait de « Illustrated Radio ».

Gauche le violoncelliste (Isao Takahata, 1982)
27/12/2010

セロ弾きのゴーシュ
Sero Hiki no Goshu
Gauche le violoncelliste
Réalisation de Isao Takahata
Film japonais de 1982

Adaptation d’une nouvelle de Kenji Miyazawa (célèbre écrivain du début du 20e siècle, dont la nouvelle Train de nuit dans la Voie lactée a donné lieu à une autre adaptation en dessin animé, en 1985 par     Gisaburo Sugii, film qui divise les foules par sa lenteur mais que j’ai trouvé formidable). Gauche est un médiocre joueur de violoncelliste. Au début du siècle, où les films muet dominent, les orchestres sont en demande et ce n’est pas étonnant d’y trouver un musicien médiocre à l’emploi. Cependant, chez lui, des animaux de la forêt sont vivement intéressés par sa musique.

L’histoire de Gauche fait penser à une vieille fable d’il y a longtemps. L’on a malheureusement un protagoniste creux propre à ce genre d’histoires, mais c’est tout ce qui l’entoure qui est intéressant. La façon dont les animaux, que Gauche semble prendre au début pour des esprits (d’un oeil occidental, sa première réaction hostile face à eux est étrange), viennent interagir avec Gauche constitue l’essence du film. C’est qu’il s’agit d’une « fable » sur l’art et l’enseignement. Les animaux emploient la ruse pour déjouer le violoncelliste et le dernier qui le visite est d’une ambiguïté assez formidable.

Le budget du film était peut-être très bas. Le film fait tout juste une heure. Format d’image carré, on sent fortement que les dessins ont passés au Xerox et l’animation est limitée, cela donne des airs de série télé. Mais si contrainte budgétaire il y avait, elle est bien contournée par des plans poétiques et minimalistes. Et la musique orchestrée qui accompagne le film sans relâche du début à la fin ajoute une richesse évidente. Je suis un peu divisé sur le film, peut-être manque t-il un peu de viande autour de l’os, j’aurais aimé un film plus long qui aurait rendu le protagoniste plus détaillé, plus vivant. Des films du réalisateur, c’est peut-être celui qui m’a le moins touché, mais je n’irais même pas le qualifier de mauvais. Oui, j’aime mon Takahata.

Il ne me reste que le documentaire sur la rivière Yanagawa et j’ai vu tout les films de Takahata! Et vivement qu’il termine son film actuel.

Jarinko Chie (Isao Takahata, 1981)
26/12/2010

じゃりン子チエ
Jarinko Chie
Kié la petite peste (Traduction officielle… Sans doute parce que le nom original, Chié, est peu élégant en français?)
Réalisation de Isao Takahata
Film japonais de 1981

Jarinko Chie est le retour d’Isao Takahata au cinéma après une décennie presque exclusivement dédiée aux séries télévisées. Cela se ressent presque dans la structure du film, à moins que cela provienne du manga dont le film s’inspire. Un peu comme Mes voisins les Yamadas, il y a une structure épisodique mais elle est beaucoup moins marquée, et on a davantage l’impression qu’il s’agit de la vie au quotidien, au jour le jour (Chie citant même le « après tout, demain est un autre jour » de Gone with the Wind, devant une affiche du film question d’être clair, mais si l’on ne connait pas l’oeuvre, c’est inutile d’être aussi clair) plutôt qu’une série de vignettes distinctes. Les deux films sont aussi un regard sur la famille, mais Jarinko Chie concerne une famille particulière, les parents de Chie sont séparés, elle vit dans la pauvreté avec son père un peu trop rock ‘n roll pour s’occuper correctement d’elle. Chie visite en secret sa mère, et essai d’arranger cette vie chaotique à sa manière. D’ailleurs le caractère fort et dominant de Chie a un quelque chose des protagonistes féminins (et pro-féminin) de Miyazaki.

Mais Jarinko Chie est un film typiquement Takahata. Soit que pendant que Miyazaki réalise ses fantasmes de voir le monde actuel anéanti par une force plus grande qu’elle pour laisser place à un monde lointain en harmonie avec la nature, Takahata pose sa caméra devant ce monde actuel et la regarde la plus objectivement possible. C’est un monde imparfait avec lequel il faut se faire et il y a aussi peu de fin que de commencement. Le déroulement du récit dans Jarinko Chie sert à développer une étude des personnages présent. Et les personnages sont fascinants, en particulier le père qui malgré les mensonges, les mauvaises habitudes et le mauvais caractère a bon coeur.  Le style visuel est beaucoup plus comique et il y a une bonne dose de slapstick dans ce film, mais il agrémente bien cet univers (dominé par une petite fille et un père immature et leurs relations, je trouve que c’est de circonstances) et laisse place à des trouvailles sympathiques. La bande-son, un mélange de pop douce et de smooth jazz, fait d’époque mais ajoute une légèreté. Si l’on considère tout ces éléments, l’on a une situation difficile et tragique, mais l’approche esthétique représente Chie elle-même, l’espoir et l’optimisme.

Jarinko Chie nous présente une famille en pièces, jusqu’aux grand-parents, où la petite fille constitue un aimant qui rassemble le puzzle. La fin du film est un peu hors contexte et je ne sais pas exactement quoi en penser, mais sauf cela Takahata prouve encore une fois qu’il est un nom clé dans ce qui a permis à l’anime japonais de maturer. Je pense que, contrairement à Mamoru « t’as vu, un complot gouvernemental dans mon film » Oshii, Takahata fait vraiment un cinéma mûr et profond qui fait honneur à cet art qu’est l’animation. Même si Jarinko Chie est une comédie avec un nombre imposant de blagues en bas de la ceinture.

Note : la France semble plus familière avec le travail de Takahata chez Toho que le reste du monde (sauf le Japon, bien sûr). Il semble que Chie et Gauche soient considérés comme des obscurités dans le monde de l’anime anglophone. Les films ont eu une édition DVD pour l’Europe française.

L’Horloge magique ou La petite fille qui voulait être princesse (Ladislas Starevitch, 1928)
25/12/2010

L’horloge magique ou La petite fille qui voulait être princesse
Réalisation de Ladislas Starevitch
Film français de 1928

Bombastus, mystérieux et ancien horloger, crée une géante horloge magique habitée par un royaume féerique. Les 12 chevaliers du roi du royaume de l’horloge sont amoureux de la princesse, et à chaque heure l’un d’eux tente de la séduire. Mais le treizième chevalier, le chevalier noir, ne suit pas ces règles… Yolande, fille de l’horloger, décide de s’impliquer dans l’histoire et de modifier le cours du temps.

À 45 minutes, L’Horloge magique est sur la fine ligne entre ce que certains considère un long-métrage ou un court-métrage. Hors, je vais me contenter de considérer le terme anglophone « feature length », si un film est assez long pour être la présentation principale, c’est un long-métrage. Considérant cela, le contexte des années 20, le cinéma muet et la règle des Academy Awards qui dicte qu’un film est un long-métrage à partir de 40 minutes, eh bien nous avons ici le deuxième long-métrage d’animation de l’histoire, si l’on fait exception aux films aujourd’hui disparus de Quirino Cristiani. À vous de juger, et quoi qu’il en soit ce n’est pas très important.

Ladislas Starevitch prouve sans problème qu’il est un des maîtres incontestable du stop-motion, animant de très longues pièces entièrement seul, avec son esthétique gestuelle qui lui est propre et d’une fluidité rare pour l’époque. Les personnages ont une foule d’expressions faciales, bougent comme ils le veulent et même la caméra bouge, une rareté en Stop-motion. Il y a aussi cette signature visuelle de Starevitch, l’utilisation de «motion blur», chose que l’on ne verra nul part ailleurs en Stop-Motion jusqu’aux années 80 dans les effets spéciaux à Hollywood. Il y a aussi d’épatantes prises de vues avec des acteurs réels et des personnages en stop-motion autour.

Le film souffre un peu dans la deuxième partie, moins intéressante que la première. Deux personnages s’ajoutent à l’histoire et prennent subitement beaucoup de place, et on se demande d’où savent-il les noms et les désirs des protagonistes. La fin ne résout pas toute l’histoire et c’est dommage. Le principal intérêt est le charme et la féerie à l’ancienne de l’univers du film. Sans être, ni au plan narratif, visuel ou technique, Le Roman de Renard, le film que Starevitch réalisa ensuite (entre 1929 et 1930, pour sortir qu’en 1937) et qui est sans doute son ultime chef-d’oeuvre et un bijou du cinéma d’animation, L’Horloge magique reste une belle pièce d’animation enchanteresse. Mais… comment? Vous n’avez jamais vu Le Roman de Renard? Non mais! Non maiiis!!!

Bennys badekar (Jannik Hastrup et Flemming Quist Møller, 1971)
24/12/2010

Bennys badekar
La Baignoire de Benny
Réalisation de Jannik Hastrup et Flemming Quist Møller
Film danois de 1971

Ce film est vu comme un classique au Danemark, mais il a rarement été vu hors de son pays d’origine. Et c’est dommage car il s’agit d’un film de qualité, d’une esthétique débordante de vitalité et d’imagination. Des films comme Bennys badekar, il n’y en a pas d’autres.

Benny est un petit garçon qui vit dans ville moderne, entourée d’une architecture froide à la Le Corbusier et de parents négligeant. C’est un monde fait de photographies en noir et blanc, seuls les êtres vivants sont des personnages animés en couleurs. Après avoir récupéré un têtard dans un petit lac adjacent, Benny découvre que celui-ci est un prince et l’amène découvrir un monde en couleurs au fond de sa baignoire! Il s’échappe du monde froid dans lequel il vit pour en découvrir une parodie peuplée de personnages étranges.


Bennys badekar épate par son style graphique. Les dessins sont des taches de couleurs, on sent la peinture s’animer à chaque image, créant une texture très particulière, vivante. L’animation est de bonne qualité, sans être techniquement parfaite ou réaliste elle regorge d’idées étranges, les personnages prennent les formes qu’ils veulent, s’allongeant le nez ou se dédoublant, il n’y a absolument aucune règle et seule l’inventivité règne. Le moment le plus fascinant du film est lorsqu’un numéro musical explose et devient de l’animation directe sur pellicule, ce qui crée une danse de couleurs abstraites complètement folle et pourtant tout à fait dans son contexte. C’est, j’en ai bien l’impression, le seul exemple au monde d’animation directe dans un film d’animation «mainstream».

Je viens de mentionner la présence d’un numéro musical mais il y en a plusieurs, au point qu’il s’agit avant tout d’un film en musique. Celle-ci est tout aussi imaginative et belle que l’image, passant par plusieurs styles exotiques, sitar ou musique latino et toujours rhytmée. Voilà un film inspirant qui donne envie de prendre ses outils, faire un film et de rejoindre la fête. Jannik Hastrup et Flemming Quist Møller sont aussi les réalisateurs de Samson og Sally (1984), un autre long-métrage d’animation sous-marin, concernant deux baleines, que plusieurs au Québec ont vu jeune dans le temps des fêtes…

Patlabor 2: The Movie (Mamoru Oshii, 1993)
23/12/2010

機動警察パトレイバー 2 the Movie
Kido keisatsu patoreba 2: the Movie
Patlabor 2: The Movie
Réalisation de Mamoru Oshii
Film japonais de 1993

Okay, cool story bro, mais pourquoi ça s’appelle Patlabor 2? Vous savez combien de temps l’on voit des robots géant en action dans Patlabor 2? 5 minutes dans un film qui en fait 113, 5 petites minutes vers la fin. Il me parait clair que Mamoru Oshii joue avec les conventions et les attentes des spectateurs. Tout les enfants de 7 ans qui ne vivent que de dinosaures et de robots sont déçus par Patlabor 2. Oshii s’envole dans ses grandes histoires complexes d’adultes qui font des choses d’adultes. Il y a des mots comme « gouvernement », « terrorisme », « loi martiale » et « conspiration ». Serious business.

Patlabor 2 est visiblement plus populaire chez les fans que Patlabor le premier. Cette suite bénéficie d’une attitude « okay, tout ce qu’on a fait dans le premier, faut mieux le faire ». Donc la première chose qui est améliorée ce sont les visuels. Le dessin est plus solide, et c’est beau de voir des dessins si complexes s’animer, même si c’est à un framerate qui crie famine. Il y a beaucoup plus d’animation, même si l’on a toujours droit à une bonne poignée de plans complètement statique avec un personnage qui parle de dos et absolument rien qui bouge. Il reste que l’animation permet de donner un peu plus de vie aux personnages. Même le fameux coup des plans en fish eye revient avec plus de justification et de subtilité. La musique est mieux. Mais vraiment ce qui est particulièrement plus impressionnant c’est la qualité cinématographique de l’ensemble. Elle est subtile, gracieuse et difficilement reprochable. Le jeu d’ambiance est excellent, le jeu d’éclairages, de couleurs et du climat agrémente très bien le film. Plusieurs plans calmes, notamment lors de la première neige du film, ajoute vraiment une beauté au film. Peu de thriller politique ont une telle impression de calme dans leur cinématographie. Je pense à The Manchurian Candidate avec Frank Sinatra, ou Z de Costa-Gavras, le style est plus nerveux, enragé même. Ah parce que Patlabor 2 est un thriller politique? Oui, et c’est là que ça se gâte.

Je demandais plus haut pourquoi le film se nomme Patlabor 2. La raison évidente c’est tout simplement parce que l’on suit les même personnages que le premier Patlabor, qui ont depuis passés à autre chose dans leurs carrière respective. Mais ces personnages ne constituaient pas l’intérêt du premier film et ils ne sont pas davantage développés dans Patlabor 2. Bon, l’un d’eux se retrouve impliqué un peu plus personnellement dans l’histoire, mais je n’ai pas eu l’impression que ça ait un quelconque impact sur le film. On reste au même point qu’au premier film. Et donc ces personnages se retrouvent impliqués dans une grande histoire de «coup d’état», thriller politique qui va se fourrer le nez jusque dans les plus insignifiants détails. C’est… C’est… sans grand intérêt. Si le scénario très hollywoodien du film précédent fonctionnait bien pour moi, ici il y a vraiment de grandes ambitions politiques digne d’un Tom Clancy qui ne me touche pas du tout. Oshii cherchait t-il à dire quelque chose sur la situation politique de son époque?

Les deux Patlabor sont finalement assez différents, le premier bien commercial, le deuxième semblant plus personnel. À juger mon opinion des deux films, l’on aurait pu avoir un film vraiment bien, pas encore un chef-d’oeuvre mais quelque chose de mémorable, en mélangeant les bons points des deux films, vu qu’ils ne concernent pas les même éléments. Quoi que l’on aurait encore des personnages principaux inintéressants. Il parait qu’il faut voir l’OAV original, finalement.


Patlabor: The Movie (Mamoru Oshii, 1989)
22/12/2010

機動警察パトレイバー the Movie
Kido keisatsu patoreba: the Movie
Patlabor: The Movie
Réalisation de Mamoru Oshii
Film japonais de 1989

Si son nom est bien connu, je suis quand même peu familier avec Mamoru Oshii. Sa carrière semble avoir pris une étrange direction depuis plusieurs années, mais il reste un nom populaire.  J’ai vu Ghost in the Shell et le fascinant Angel’s Egg. D’ailleurs, à comparer ce dernier avec Patlabor, l’on pourrait difficilement faire deux films plus différent : l’un est une odyssée surréaliste hors du commun, l’autre est un film policier assez commercial. Tout les deux ont leurs mérites.

Patlabor : The Movie (parce que Patlabor a commencé avec une série d’OAV (animation Direct-to-video), qui n’est pas nécessaire de voir en premier lieu) nous présente un corps policier qui se spécialise dans les incidents concernant les «labors», des robots-travailleurs opérés par des individus. Ces policiers sont eux-même équipés de labors de patrouille, les patlabors. Le film prends les allures d’une série policière hollywoodienne des années 80-90, avec un «scientifique fou» (obsédé par babylone, une trace de l’obsession pour la religion catholique de Mamoru Oshii. D’ailleurs il y aurait de quoi analyser le rapport entre babylone et l’emploi de la technologie dans le film mais… c’est juste pas intéressant), une ville entière en danger et des policiers qui doivent s’ajuster à une situation extraordinaire. Mais bien sûr, avec des robots en plus, ce qui ajoute une certaine grandeur à l’ensemble.

Je m’attendais à un film plein d’action avec un focus sur les robots, mais ce n’est pas le cas, c’est étonnant comment l’on voit peu de robots en fait, et que l’attention est portée à l’équipe de policiers. Il y a énormément de scènes de dialogues, un léger excès d’emphase sur du background, et je n’aime pas les films qui ignorent comment raconter quelque chose autrement que par présenter du background avec de longs dialogues. Mais ce n’est pas si excessif que ça. Par contre il y a beaucoup de personnages et qui du coup ne sont pas si développés que ça… mais sûrement ailleurs dans la franchise.

L’animation est ultra statique, il y a un nombre hallucinant de plans plutôt longs qui se résument qu’à un dessin et trois positions de bouches. Le dessin détaillé et l’esthétique générale compense la lacune, quelque chose de courant en Anime. Mais il y a deux ou trois scènes d’action, notamment le climax du film, qui compensent le tout. Animer des mechas aussi détaillés étant impressionnant en soi. Par contre il y a quelque chose de très curieux, et c’est que malgré l’atmosphère très sérieuse du film, il y a recours à des expressions caricaturées à de rares moments, qui font un très étrange contraste. Plus étrange encore est la présence soudaine d’une petite scène en fish-eye, qui sort de nul part et contraste fortement avec le ton généralement naturaliste du film. Difficile de savoir comment réagir avec un plan qui ressemble à ça:

Patlabor est un bon blockbuster d’intrigue (intéressante) et d’action (excitante), qui se distingue (distinguait?) par son mélange équilibré de film policier et sci-fi, sans pour autant épater la galerie. Il y a aussi l’intérêt particulier que ce soit un film d’animation, d’ailleurs j’imagine qu’un scénario du genre aurait difficilement pu être adapté en prise de vues réelles à l’époque. Le film ne pourra pas convertir quiconque allergique au genre, mais pour ma part j’ai bien envie de voir Patlabor 2 à présent. Pour les plus aventuriers, regardez Angel’s Egg!

La Rosa di Bagdad (Anton Gino Domenighini, 1949)
21/12/2010

La Rosa di Bagdad
La Rose de Bagdad
Réalisation de Anton Gino Domenighini
Film italien de 1949

Un long-métrage d’animation d’avant 1950 est excessivement rare. L’on connaît surtout Disney et un tout petit peu Fleischer (Guliver’s Travels, Mr.Bugs Goes to Town). Et pour l’animation européenne qui débute, il s’agit d’une influence monstre. Du coup La Rosa di Bagdad est clairement, clairement influencé par l’animation de Fleischer et il faut le savoir que c’est un film italien.

L’histoire n’est pas incroyablement fascinante, on a un vilain calife qui veut marier la jolie princesse que le pauvre petit charmeur de serpent aime vraiment du fond de son coeur noble, juste et vertueux. Le vilain calife fait appel à un encore plus vilain sorcier capable de faire n’importe quoi. L’on a aussi 3 conseillers qui font office de 7 nains à plus bas budget et un petit oiseau mignon qui aidera le petit charmeur de serpent. Je ne vous gâche rien si je dis que tout finira bien? Par contre malgré le classicisme l’histoire arrive quand même à être confuse à quelques moments, des personnages partent à l’aventure, vont comme par hasard dans le bon chemin et tombent sur les méchants. Le méchant lance un sortilège à un moment qui n’a pas beaucoup de sens (avec une fontaine de jouvence). D’ailleurs ce dernier a une comportement louche, il jette un sortilège plutôt raciste, pourtant les deux seuls alliés que l’on voit du calife et du sorcier sont noirs. C’est pas joli.

C’est intéressant de voir comment le moyen-orient et les contes des 1001 nuits inspirent le cinéma d’animation. Le deuxième long-métrage d’animation japonais sortait l’année précédente avec un thème similaire (Bagudaddo-hime, 1948), le premier long-métrage Allemand racontait l’histoire du prinche Achmed et vous pouvez trouver d’autres exemples par vous même.
Pour un premier long-métrage l’italie, en ce qui concerne la technique, s’en sort bien. Il est dur de comparer avec des équivalents d’époque, c’est moins remarquable que les grandes productions américaines mais mieux que disons le travail de Jean Image en France. L’animation, c’est-à-dire le travail des animateurs eux-même ne fait pas défaut, il y a quelques mouvements assez étranges mais qui sont encore corrects, cependant c’est l’aspect technique qui bug ici et là. Une image déplacée lors d’une frame, des couleurs qui se déplacent subitement, des animations qui répètent d’une manière très apparente un même cycle… Ce sont les gens au travail technique qui se sont plantés à quelques occasions. Mais en fait tout cela reste assez mineur.

La Rosa di Bagdad est moins beau qu’un Disney, moins drôle qu’un Warner, moins surréaliste qu’un Fleischer. C’est un film un peu mou qui ne fait rien pour se distinguer, autre que du mérite d’être le premier long-métrage d’animation italien (et sur ce point de vue là, il ne sera quasiment d’aucune influence, 10 ans plus tard Bruno Bozzetto sera vu comme le point de départ de l’animation italienne). Il se laisse regarder et l’on ne sursaute qu’aux occasionnelles maladresses. Mais étant donné qu’il n’y a presque aucun autre film d’animation de cette époque, La Rosa di Bagdad est au moins un des rares représentants de cette animation à l’ancienne, ronde et fluide, et pour cela tant mieux.